lundi 18 mai 2015

Une peau d'ours



Le djulkhir ou «  peau d’ours » est un tapis à poils longs que l'on retrouve chez les Ouzbeks, Kazakhs et les Kirghiz. Il peut être considéré comme une des formes d’art majeur de ces peuples d’Asie centrale. Ces tapis étaient normalement destinés à un usage propre et non à la vente. La fonction des tapis djulkhir n'est pas clairement établie: ils pouvaient être accrochés comme décoration à la paroi de la yourte, être utilisé comme tapis de sommeil, sur le sol pour s'assoir près de l’âtre et peut être même comme porte d'entrée ayant fonction de bannière.


Les Kirghizes dont le nom signifie les 40 tribus sont des nomades Turcophones qui ont sillonné l’Asie Centrale pendant des siècles. Le Kirghizistan est un petit pays très montagneux devenu indépendant en 1991. L'art du tapis n'est pas pratiqué partout, c’est surtout dans les régions du sud près de l’Ouzbékistan et du Tadjikistan que sa fabrication est le plus répandue.


Les ouvrages étaient tissés sur des métiers étroits. Certains sont confectionnés d’une seule pièce environ 1 x 3 m, ou sont assemblés de bandes étroites d'environ 30 cm. La dénomination « peau d’ours » appartient sans doute au monde du chamanisme, qui attachait une importance particulière à la symbolique de l’ours et du loup.




Les matériaux utilisés étaient la laine de mouton,  les poils de chèvre,  de chameau et de yak ( le mont Jengish Chokusu à l’extrême est du Kirghizistan culmine à 7439 m) ainsi que du coton.
Certaines tisserandes étaient considérées comme spécialiste, elles connaissaient les motifs et les techniques, étaient les garantes des traditions, et étaient invitées pour la préparation d’un nouveau tapis et la supervision des jeunes tisseuses.
Une des affaires les plus importantes pour une fille Kirghize était sa dot. Pour une fille riche la dot devait entre autres inclure 9 tapis, 9 tapis en feutre et 9 peaux de mouton.
En général, les tapis anciens sont petits. Cependant, à la fin du 19ième siècle, les tisserandes ont commencé à fabriquer sur commande de très grands tapis, dont les dimensions ont parfois même atteint les 100 m². Elles en ont beaucoup fabriqué pour le commerce durant cette période,  jusqu'au début du 20ième siècle. Les tapis étaient vendus sur le marché d’Andijan dans la vallée de la Ferghana pour des marchands  Arméniens et Tatars.
Au début du 20ième siècle la sédentarisation forcée dans des fermes collectives imposée par les autorités russes a fait disparaitre ce genre de production. Des familles kirghises qui avaient fui l'invasion Russe en Afghanistan ont perpétué jusque dans les années cinquante la tradition de la "peau d'ours".